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Interview Nathalie Blanc

Chargée de mission relations internationales

Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis enseignante chercheure, j’ai été recrutée à l’IUFM de Lyon en 2005 après avoir soutenu un doctorat en sciences du langage sur l’appropriation du FLE chez les enfants. Ma trajectoire professionnelle s’est donc construite à travers l’apprentissage et l’enseignement des langues. J’ai effectué deux longues mobilités à l’international, à 19 ans à Madrid puis de 21 à 23 ans en Irlande du Nord où j’ai été assistante de français dans un lycée puis lectrice à l’université Queen’s de Belfast. Ces expériences linguistiques et interculturelles ont été fondatrices dans ma vie, personnelle et professionnelle. Je me sens donc totalement à ma place aujourd’hui en tant que chargée de mission aux relations internationales dans un institut qui forme les futurs enseignantes et enseignants. Par ailleurs, mon statut de chercheure me conduit à articuler mes recherches (sur la diversité linguistique, l’allophonie, l’éducation en contexte plurilingue, les interactions en classe) avec mes enseignements dans le master MEEF et ma mission RI. Réciproquement, les partenariats que j’ai pu nouer par la recherche m’ouvrent des perspectives pour créer de nouveaux stages à l’étranger et des projets à l’international. Ainsi les différentes facettes de mes missions s’alimentent mutuellement, j’y trouve du sens et cherche à en construire entre recherche et formation.

Quel est votre rôle en tant que chargée de mission relations internationales ?
Ma mission consiste à gérer la dimension internationale de l’institut et de la formation, à différents degrés et dans différentes sphères. Elle comprend bien entendu la supervision de la mise en stage de près de 200 étudiants et stagiaires (des 4 universités Lyon 1 (Loire et l’Ain compris), Lyon 2, Lyon 3 et Jean Monnet à Saint Étienne) dans des établissements à l’étranger, pour des durées de 1 à 4 semaines, en M1, M2, et DU. L’Inspé de l’académie de Lyon est notamment celui qui comptabilise le plus de départs et d’offres de stages parmi les Inspé en France. Nous avons construit différents partenariats avec des établissements scolaires (privés ou publics, français ou étrangers) sur les quatre continents, grâce à une équipe d’une quinzaine de formateurs et formatrices sur les trois sites qui, avec dynamisme et conviction, ont noué des contacts via des missions de formation ou de recherche. Nous œuvrons chaque année à travers l’accompagnement des stagiaires à l’international comme par le biais de nos divers enseignements chacun à notre échelle (dans des disciplines variées : langues, géographie, français, mathématiques, petite enfance, arts, etc.) à faire valoir le rôle (trans)formateur de ces stages. L’expérience professionnelle à l’international permet en effet aux étudiants de se décentrer, de vivre eux-mêmes une situation interculturelle et d’allophonie, de prendre du recul par rapport au système éducatif français et par extension à la politique (éducative, linguistique...) française, au moment où ils entrent dans le métier. Nous sommes convaincus que forts de cet enrichissement, de ce décalage vécu, de ces étonnements rencontrés, ils seront davantage conscients et sensibles face à la diversité linguistique, culturelle, sociale de leurs élèves, et trouveront en eux les ressources pour mieux les aider à grandir et à apprendre.

Au-delà de la coordination de l’équipe pour l’organisation des stages, en étroite collaboration administrative avec Olivier Matagrin ; je représente notre institution lors de déplacements à l’étranger et lors d’accueil de délégations étrangères en France. Je gère également les mobilités entrantes et sortantes dans le cadre d’Erasmus : chaque année quelques étudiants demandent à partir un semestre dans un pays européen, entre le M1 et le M2, ou encore candidatent pour le programme d’assistants de langues à l’étranger, pour lequel je suis la référente en lien avec le CIEP à Paris (Centre international d’études pédagogiques). Ce dernier semestre nous avons accueilli une jeune diplômée espagnole, de Valencia, qui souhaitait parfaire sa formation en langue française et en didactique et être stagiaire dans des classes de l’académie. Nous lui avons conçu un programme adapté en partenariat avec les services académiques et les conseillers pédagogiques en langues vivantes : elle a pu intervenir en espagnol et en français dans trois écoles de la Duchère, et initier un projet de correspondance entre élèves français et espagnols (cf. article sur le site de l’académie[1]).

Quels sont les projets en cours et à venir ?

Nous avons des projets à différentes échelles : locale, au sein de l’université cible, au niveau national et international. Au sein de l’Inspé notre objectif est de développer la mobilité des étudiants et stagiaires du second degré, parcours PLP et CPE y compris, un nouveau partenariat avec le lycée français international de Pondichéry en Inde va notamment permettre d’accueillir deux étudiantes (en lettres et CPE) dès cet hiver. Nous souhaitons également promouvoir la mobilité du personnel et en particulier administratif, le déplacement tant physique que culturel au sein de notre milieu professionnel est bénéfique à bien des égards tout au long de la vie et quelle que soit notre fonction !

Le Projet ARQUS, à l’échelle de l’université cible, devrait pouvoir y contribuer grandement, il s’agit en effet d’une importante dotation de l’Europe pour renforcer et innover l’internationalisation et la mobilité tout azimut, au sein d’un consortium de 7 universités européennes du sud au nord. Il s’agit d’une forme de nouvelle génération d’Erasmus qui vise à fédérer tous types de projets alliant recherche, enseignement, formation professionnelle et mobilité.

À l’échelle nationale s’initie la mise en place d’une nouvelle Certification d’aptitude à participer à l’enseignement français à l’étranger (CAPEFE), pour laquelle l’Inspé de Lyon sera un des centres pilotes de préparation et d’examen dès juin 2020. À plus long terme, des projets de DU ou de Master en lien avec la dimension internationale et l’enseignement en contexte plurilingue à l’étranger pourraient être réfléchis. Ces perspectives vont toutes dans le sens inévitable de l’internationalisation des parcours de formation, les métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation n’y échappent pas. On peut même avancer que dans un avenir très proche, un futur enseignant qui n’aura jamais vécu l’expérience du déplacement à travers la migration, sera en situation de handicap professionnel...

À court terme et au niveau local nous avons discuté au sein de l’équipe de rééditer l’événement « Forum des stages à l’étranger » en juin, un moment de mutualisation culturelle et pédagogique, qui se voudrait également festif. Une nouvelle forme de valorisation du stage à l’international est également en cours de réflexion, avec une perspective d’inclusion dans les futures maquettes.

Enfin, nous projetons de réorganiser de manière annuelle la conférence académique « La dimension internationale dans la formation et le métier d’enseignant » initiée en octobre dernier, avec une articulation forte à la recherche[2], en y associant les partenaires académiques (DAREIC, DAFIE, CASNAV, les universités, etc.) et d’autres institutions de formation (comme l’ESSSE[3] par exemple) pour renforcer cohérence et continuité de l’internationalisation de la formation en éducation, initiale et continuée, et assurer la circulation entre recherche et formation.

Références
  • Nathalie Blanc. Le Blog réflexif d’étonnement pour écrire l’expérience vécue à l’étranger – Réflexion interculturelle et construction de l’identité professionnelle du professeur d’école. Marie, V., Lucas, N., (éds.) Regards sans frontières sur la formation des enseignants, 2008. Le Manuscrit Université, Rennes. 188 – 224.
  • Nathalie Blanc. L’inter-agir professionnel entre terrain et recherche en éducation. Diversité : ville école intégration, CNDP, 2014, Formations, (Trans)formations : enjeux et perspectives pour l’éducation, 177.
  • Véronique Rivière, Nathalie Blanc. Observer la multimodalité en situations éducatives : circulations entre recherche et formation. ENS Éditions. ENS Éditions, 2019.

[1] http://www2.ac-lyon.fr/ressources/rhone/langues-vivantes/spip.php?article558&var_mode=calcul

[2] Les conférences des chercheures invitées lors de cet évènement sont accessibles en ligne sur le site de ELSE (Éducation en langues secondes et étrangères, du Labex ASLAN et laboratoire ICAR : https://else.hypotheses.org/).

[3] École Santé Social Sud-Est de Lyon.


Publié le 20 décembre 2019 Mis à jour le 15 janvier 2020