« Recherche-action sur les appariements dans les disciplines artistiques et scientifiques »

Recherche-action achevée.

Problématique
Dans le cadre des dominantes, les professeurs-stagiaires de l'IUFM de Lyon ont la possibilité d'expérimenter le partenariat avec des étudiants de l'Ecole des Beaux-Arts, des médiateurs du Musée d'Art Moderne (MAM) et de la Rotonde, et des ingénieurs de l'Ecole des Mines.

L'objectif de ces appariements conduits dans le cadre de la dominante est de croiser la culture scientifique ou artistique des élèves ingénieurs de l'Ecole des Mines de St.Etienne, ou des étudiants en Art et en Design, avec celle des stagiaires PE2. Ce croisement s'est développé principalement au travers de la mise au point, par le stagiaire et l'étudiant, de séances en classes effectivement testées avec des élèves au cours d'un stage en responsabilité (R2 ou R3). Ces appariements ont laissé trace sous forme de compte-rendu par les stagiaires et de prises de vue vidéos.

En quatre ans une quarantaine d'appariements ont été suivis.

Résultats intermédiaires

1. Intérêt d'un appariement avec un scientifique.
Compte tenu des observations que nous avons pu faire et particulièrement de l'analyse du corpus, il semble que l'intérêt de l'appariement pour la formation se situe du coté de la richesse et de la diversité des interactions verbales entre les 3 protagonistes : le stagiaire, le PE2 et les élèves.

Il en ressort en effet d'ors et déjà deux hypothèses, et ce, en se limitant au cadre de recherche :

  1. Les discussions entre élève ingénieur et stagiaire autour de la construction et de la conduite de séances de sciences à l'école conduiraient le stagiaire à se rendre compte qu'il est le seul des deux à savoir construire le scénario de classe : consignes, gestion du temps, mode de groupement, synthèse en cours de route... Ce constat lui conférerait une confiance en ses capacités professionnelles qui notamment permettrait de réduire la distance a priori entre enseignant et scientifique et ainsi de favoriser le dialogue. Il aura par la suite envie de continuer à travailler avec ces personnes dans d'autres classes. D'un autre côté, il prend conscience de la spécificité de la démarche scientifique, ce qui est aussi un objectif de la formation.

  2. En présence du scientifique dans la classe, le stagiaire osera davantage pousser l'investigation scientifique jusqu'au bout des capacités cognitives de ces élèves. Il n'aura pas « peur » de dire « je ne sais pas » et de se tourner alors vers le scientifique. Ceci lui permettra (et d'ailleurs aussi pour le scientifique) de constater que ces capacités sont beaucoup plus avancées qu'il ne le croyait, bien au-delà par exemple des limites piagétiennes. Nous aurions plus de mal à illustrer ce point en formation initiale.

2. Intérêt d'un appariement avec un étudiant des Beaux-Arts
Le dispositif et le déroulement ont été identiques dans le domaine artistique et les hypothèses sont semblables bien qu'il semble nécessaire de les compléter :

  1. La posture de « l'artiste » : l'étudiant en art, utilise un registre de langage qui investit la dimension sensible dans son rapport au monde. Il s'exprime avec conviction. A contrario, il ne craint pas d'émettre des doutes, des interrogations et manifeste un grand respect pour la parole de l'élève. La dimension langagière, l'attitude physique ont pour effet d'enrôler les élèves qui repèrent immédiatement qu'ils ne sont pas en présence d'un enseignant. Leur curiosité est excitée et ils se mobilisent immédiatement. Au fil des séances cependant, les situations devenant plus complexes, certaines notions méritaient d'être explicitées pour donner sens au travail des élèves. Elles n'étaient pas encore maîtrisées par des étudiants de 3ème année. A plusieurs reprises, des intervenants se sont trouvés en difficulté et leurs réponses (à la demande de l'enseignant) restaient parfois confuses.

  2. Les Professeurs d'Ecole ont une formation à caractère scientifique, assez techniciste, ce qui les laisse relativement démunis dans le champ artistique et, comme il a été constaté dans les appariements scientifiques, les interventions ont permis aux professeurs stagiaires de comprendre la spécificité de la démarche artistique ; celle-ci est jalonnée d'interrogations, d'accidents dont l'intervenant extérieur saurait se ressaisir.

Une nouvelle piste de travail grâce à l'initiative d'étudiants plus matures

Certains étudiants dont le travail est plus maîtrisé, ont mis en place une démarche originale qui ouvre une nouvelle piste dans le partenariat en général : ils ont choisi de réaliser une œuvre personnelle en s'appuyant sur une situation de classe.
Deux exemples :
  • Un vidéaste de dernière année s'est interrogé sur le sommeil en petite section et, après avoir filmé, en temps réel, les enfants endormis, il a installé une situation de langage avec les élèves qui visionnaient le montage.
  • Un étudiant en design a invité les enfants de maternelle à s'interroger sur « l'usure des doudous » sur plusieurs séances, puis il a lui-même fabriqué un tapis à partir de matériaux usés, l'a apporté dans la classe puis présenté par la suite dans son travail personnel à l'Ecole.
Ces deux exemples montrent que l'intervention dans les écoles permet aux étudiants de nourrir leur réflexion personnelle et, dans le même temps, les points de vue « décalés » qu'ils adoptent ouvrent de nouvelles questions dans le champ de l'éducation ( prendre, par exemple, en considération le temps de sommeil comme un temps vécu qui laisse des traces, et penser, avec l'enseignante, que la restitution de cette expérience contribue à la construction des apprentissages chez des tout petits). Les élèves dans ces situations participent au processus de création qui est explicité et partagé, et vivent une expérience qui leur permet d'être sensibilisé à la démarche artistique.